Serge TEAM
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Posté le: Lun Nov 07, 2011 10:08 pm Sujet du message: Sport et violence |
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Article publié par LEMONDE.FR le 26 Octobre 2011
Le sport, remède ou utopie contre la violence à l'école ?
Communément invoqué comme remède contre les tendances violentes, le sport à l'école fait l'objet de nombreuses études. Et les résultats ne sont pas aussi nets que l'on veut bien le penser.
Pendant longtemps le sport à l'école a été considéré comme une manière de préparer non la paix, mais la guerre. C'est l'usage qu'en feront les totalitarismes du XXe siècle. La situation idéologique du sport scolaire semble totalement inversée désormais : il est commun de l'invoquer pour lutter contre les tendances violentes, et en particulier pour lutter contre la violence à l'école. Un seul exemple : le livre blanc de la Commission européenne de 2007 clame haut et fort que la participation des jeunes à la pratique sportive peut les détourner de la violence et prévenir la délinquance. La recherche oblige cependant à interroger ce nouveau sens commun, qui fait du sport à l'école le pacificateur suprême.
Les travaux sont nombreux, qui permettent de mesurer l'apport de la pratique sportive à la prévention de la violence. Sans pouvoir les documenter tous, citons simplement le très important travail réalisé par une équipe allemande en 2009 auprès d'un échantillon représentatif de 33 000 élèves des écoles secondaires. Les chercheurs ont croisé le fait de participer à des activités sportives et le fait d'être auteurs d'actes violents. Ils n'ont trouvé, comme bien d'autres chercheurs, aucune preuve du pouvoir dissuasif du sport quant à la violence, pas plus qu'ils n'ont mis en lumière l'inverse : dans leur recherche le sport n'est pas non plus une cause de violence. A l'inverse, ils ont prouvé que d'autres facteurs étaient bien plus influents. Le premier de tous est le genre : la violence est surtout une affaire de garçons. Mais ils ont aussi montré l'effet du niveau scolaire (plus il est élevé, moins il y a de violence), des conditions sociales, du statut de minorité, de la violence intrafamiliale et de l'influence du groupe de pairs.
"UN SIMPLE ÉLÉMENT D'UN PROJET GLOBAL D'ÉDUCATION"
Cependant, une étude américaine tout aussi impressionnante a porté sur des échantillons de 14 000 élèves environ interrogés tous les deux ans de 1999 à 2007. Le fait de participer à des activités sportives à l'école semble promettre bien des bénéfices aux pratiquants en termes de refus de la violence (par exemple dans le port d'arme à l'école). Mais ces bénéfices sont très différents suivant la situation des élèves : ces effets sont différenciés suivant le sexe, le statut de minorité, les conditions sociales. Si l'on en croit une autre étude importante, portant cette fois sur un échantillon de plus de 75 000 élèves, ces effets sont très dépendants du type de sport pratiqué, et très sensibles à la différence de genre : les sports de contacts et d'opposition masculine agissent comme des renforçateurs des comportements violents, surtout sur les spectateurs.
Il n'y a entre ces recherches qu'une contradiction apparente. Le sport n'est pas, ne pourra pas être une solution miraculeuse pour lutter contre la violence, il peut même la renforcer. Le sport scolaire ne peut être efficace dans tous les contextes et il n'est probablement pas aussi agissant que d'autres facteurs. Il n'en est pas pour autant impuissant : il peut apporter à beaucoup, mais non à tous, et peut-être pas aux populations les plus en difficulté. Il ne mérite ni l'excès d'attente placée en lui, ni le rejet qui ferait de tout sport une violence. Il faut le considérer comme l'élément d'un projet global d'éducation et non comme le remède préventif qui permettrait après son administration d'enseigner en étant débarrassé de la violence.
Eric Debarbieux, président de l'Observatoire international de la violence à l'école - université Bordeaux-Segalen
Quelques références
Mutz, M., Baur, J. (2009), "The role of sports for violence prevention: sport club participation and violent behaviour among adolescents". International Journal of Sport Policy. Vol. 1, no 3, novembre 2009 : p. 305-321.
Taliaferro, L.A., Rienzo, B.A., Donovan, K.A. (2010), "Relationships Between Youth Sport Participation and Selected Health Risk Behaviors From 1999 to 2007". Journal of School Health. Vol. 80, no 8, août 2010 : p. 399-410.
Kreager, D.A. (2007). "Unnecessary Roughness? School Sports, Peer Networks and Male Adolescent Violence". American Sociological Review. Vol. 72, octobre 2007 : p. 705-724.
J'ai souligné la dernière phrase... Inutile dire pourquoi... |
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